Lundi 30 novembre 2009 1 30 /11 /2009 16:27

 LES ASSISES DE LA RURALITÉ DANS LE GERS  

Monsieur le Préfet,

Mesdames et Messieurs,

De quoi le monde rural a t’il besoin pour prospérer et contribuer, selon ses capacités, au développement de notre Pays ?

Telle me semble être la problématique centrale de ces « assises de la ruralité» voulue par le Gouvernement.

Une remarque de forme tout d’abord, mais qui affleure la question de fond : plus de 99% de la population gersoise n’aura pas participé, physiquement ou virtuellement, à ces assises.
 
Confidentialité des réunions publiques qui auront réuni 250 personnes au grand maximum, couverture médiatique à minima, site internet plus « boite aux lettres » que forum interactif de débat. Difficile dans ces conditions de se faire une idée claire sur les attentes réelles des citoyens.

Si l’on veut néanmoins tenter de répondre à la question que j’évoquais au début de mon propos – de quoi a besoin le monde rural – je dirai qu’il a d’abord besoin de considération. Et je formulerai, pour parvenir à cet objectif, six propositions :

Je veux d’abord dénoncer l’insupportable stigmatisation dont font actuellement l’objet les élus. Pas une semaine ou un grand média ne dénonce les « folles dépenses des élus », leur « coût », « leur incapacité à gérer ». Ces attaques sont encore plus inadmissibles lorsqu’elles prennent racines dans un discours plus ou moins officiel qui, pour justifier une réforme territoriale qu’il fallait rendre populaire, suggère que ces arguments populistes ne sont pas infondés.

Les élus locaux ne sont pourtant pas responsables des 140 milliards d’euros de déficit du budget de l’Etat en 2009, eux qui votent les leurs en équilibre chaque année. En 2010, la dette des collectivités locales représentera 7,1% du produit intérieur brut (PIB), celle de l’Etat atteindra 84% de ce même PIB.

Les collectivités locales, et en particulier les Conseils Généraux, n’ont pas de responsabilités dans l’explosion des dépenses sociales qu’ils doivent par ailleurs supporter. Pardon pour ces mots crus, mais ce sont les dérives du capitalisme financier, et ses conséquences sur l’économie réelle, c’est la politique du Gouvernement marquée du sceau de l’injustice fiscale, qui expliquent l’envolée du nombre de Rmistes comme celle des allocataires du RSA. Au passage, permettez-moi d’exprimer un souhait : que ces dépenses reviennent dans le giron de la solidarité nationale.

Ce n’est pas non plus la faute des collectivités locales, départements et régions, si l’Etat se dispense d’assumer à leur égard les responsabilités financières qui lui incombe.

Dans le Gers, entre 2002 et 2009, la « dette cumulée » de l’Etat en raison des transferts de compétences que celui-ci a imposés au Conseil Général, s’établit à 12.5M€ et atteindra 21.4M€ à la fin de l’année 2010.

Deux exemples pour illustrer mon propos, l’APA et le RMI.

S’agissant de l’APA et alors que la loi induisait de fait une parité du financement entre l’Etat et le Conseil Général, ce dernier est désormais contributeur à hauteur de 73% de son financement. Pour le RMI les chiffres sont encore plus nets : alors que le transfert de la gestion du RMI aux départements s’était fait sur la base d’une compensation « à l’euro près » la différence entre le montant des  allocations que le Conseil Général du Gers aura versées et la compensation qu’il aura reçue de la part de  l’Etat atteindra 12.4M€ fin 2010.

1) Ma première proposition, pour la ruralité, est celle-ci : que l’Etat « remette les compteurs à zéro » en versant au Conseil Général les 20M€ qu’il lui devra fin 2010. Celui-ci investira alors, à due concurrence de ces 20M€, dans des projets d’avenir, portés par lui-même ou par les communes du Gers et leurs groupements.

Ce dont le monde rural, ses habitants ses communes, a également besoin c’est d’une stabilité, financière et institutionnelle, stabilité qui est mise à mal par les projets de réforme du Gouvernement.

Stabilité financière pour les citoyens tout d’abord :

En 2010, les gersoises et les gersois vont devoir payer un nouvel impôt, créé par le Gouvernement et voté au Parlement  par les députés et les sénateurs de la majorité. La taxe carbone, telle qu’elle a été conçue et  telle qu’elle sera compensée, va constituer une véritable « taxe sur la ruralité », qui va manger un peu plus le pouvoir d’achat des plus modestes, je pense notamment aux retraités agricoles et aux salariés pauvres.

Le montant de la compensation de la taxe carbone d’un couple avec deux enfants vivant dans le Gers s’établira à 142€ en 2010. Mais en réalité, compte tenu des modes de transport et de chauffage dont ce foyer est tributaire, il devra acquitter une taxe carbone d’un montant moyen de 222€

Dès la première année 80€ de différence pour un impôt qui devait être compensé, lui aussi, à l’euro près, ça n’est ni juste, ni équitable.

2) Ma seconde proposition, pour la ruralité, est celle-ci : que la compensation de la taxe carbone en milieu rural tienne compte de la réalité des territoires, et non pas de calculs fait par des gens sans doute savants, mais qui n’ont jamais traversé le boulevard périphérique.

Stabilité financière pour les collectivités locales aussi :

Pour cela, le Gouvernement doit retirer son projet de suppression de la taxe professionnelle. On ne remplace pas un « impôt imbécile » par une réforme qui l’est tout autant.

En dépit des explications du Premier Ministre lors du Congrès des Maires de France,  ceux-ci ont réitéré leur demande de retrait d’une « usine à gaz » qui, en fin de compte, va se traduire par moins d’impôts pour les entreprises, plus d’impôts pour les familles, et moins de ressources pour les collectivités locales.

Que ce soit au cours des différentes réunions de ces assises, ou dans les contacts que nous avons régulièrement avec les chefs d’entreprises du Gers, jamais la question de la taxe professionnelle n’a été évoquée comme un obstacle à l’implantation ou l’extension d’une entreprise, encore moins comme un motif de délocalisation.

Quand des entreprises comme Latécoère, Prolainat ou demain JCB Aéro projètent de s’implanter ou de s’étendre dans le Gers, ça n’est pas le taux de taxe professionnelle pratiqué qui les préoccupe, mais le niveau d’aide que les collectivités locales sont susceptibles de mobiliser pour alléger leurs investissements, ou réaliser des équipements dont elles ont besoin.

Si demain, il n’y a plus de recette fiscale économique pour les collectivités locales, pourquoi voudriez-vous que celles-ci, qui ont les pires difficultés à assumer leurs compétences obligatoires, continuent de subventionner de tels investissements ?

3) Ma troisième proposition, pour la ruralité, est celle-ci : que le département du Gers et les 463 communes du Gers et leurs groupements continuent de disposer d’une ressource fiscale autonome et économique, pour les inciter à poursuivre dans la voie du développement économique.

Stabilité financière, mais stabilité institutionnelle aussi :

Pour 73% des français, la réforme des collectivités locales défendue par le Gouvernement est incompréhensible et pour 51% d’entre eux, elle va porter atteinte aux territoires ruraux.

En supprimant la clause de compétence générale pour les départements et les régions, la réforme territoriale va conduire ces deux collectivités à ne plus pouvoir accompagner financièrement toute une série de projets.

Je l’ai dit lors du Congrès départemental des maires et je le redis ici, si le Conseil Général et la Région ne peuvent plus conforter les capacités de financement des communes, la majorité de leurs projets ne verra pas le jour.

Pareil pour les associations culturelles, sportives, sociales, qui connaissent déjà les plus grandes difficultés du fait du retrait de l’Etat, et dont beaucoup disparaîtront, faute de moyens et de partenaires.

4) Ma quatrième proposition, pour la ruralité est celle-ci : pour que les territoires ruraux vivent et se développent, je demande à ce que la « clause générale de compétence » soit maintenue pour le département et la région.

Comment évoquer l’avenir de la ruralité sans évoquer la situation dramatique des agriculteurs et celles des services publics dans notre département.

Pour ce qui est des agriculteurs, il est de plus en plus clair que le dialogue avec le Gouvernement est une suite de rendez-vous manqués. La crise que connaissent toutes les filières agricoles gersoises, l’angoisse des jeunes agriculteurs qui ne savent même plus s’ils vont pouvoir terminer l’année, l’inquiétude face à un bilan de la PAC qui pourrait se traduire à terme par une perte sèche de 200M€ pour la « ferme Gers », tout ceci n’a pas trouvé d’écho auprès du Gouvernement. Et ce ne sont pas les 650 M€ d’aides ou le milliard de prêts bonifiés disponibles qui parviendront à soulager les trésoreries exsangues des agriculteurs gersois.

5) Ma cinquième proposition, pour la ruralité, est celle-ci : que l’Etat consacre au moins autant d’argent à la crise agricole qu’il en a consacré à la baisse de la TVA sur la restauration ou à l’économie décarbonée dans le cadre du grand emprunt, soit 3,5 milliards d’euros.

 
Pour les services publics, dont je rappelle qu’ils sont le patrimoine de ceux qui n’en ont pas les chiffres parlent d’eux-mêmes :

 
Depuis 2001, nos écoles ont accueilli 1112 élèves supplémentaires. Malgré cela, depuis 2001, nous avons perdu 14 postes d’enseignants et 7 écoles ont fermé.

 
Pour la Poste, alors même que notre département ne remplit pas les conditions légales, le changement de statut voté par les sénateurs de la majorité conduira, quoiqu’on en dise, à une privatisation qui réduira encore un peu plus l’offre postale dans le Gers.

 
Que dire des trésoreries de proximité de Miélan et de Saramon, dont la fermeture sera annoncée, dès le lendemain des élections régionales.

Que dire des menaces graves qui pèsent à nouveaux sur les effectifs de gendarmerie dans notre département. La presse nous décrit chaque jour un Gers qui ressemble de plus en plus aux faubourgs de Chicago, et dans le même temps, le Général Soubelet, commandant de la région de gendarmerie de Midi-Pyrénées m’écrit que « la perte de quelques gendarmes dans le Gers doit constituer une incitation supplémentaire à mener une réflexion sur des bascules d’effectifs et parfois des regroupements d’unités très proches les unes des autres », fin de citation.

Au lieu d’organiser une « surveillance citoyenne », contestable bien qu’encouragée par les représentants de l’Etat, en se basant sur les résultats d’un département –les Alpes-Maritimes- qui figure au 3ème rang national pour les actes de délinquance alors que nous naviguons depuis quelques années au-delà de la 9ème place, nous devrions nous mobiliser pour réaffirmer ensemble que la sécurité est une compétence régalienne dont la responsabilité incombe à l’Etat. Voilà pourquoi ce qui m’inquiète, moi, c’est la baisse des effectifs de sécurité qui se traduira dans le budget de l’Etat par la suppression de 2000 postes de policiers de terrain en 2010.

Que penser, au moment où le Gouvernement encourage les départements à réaliser des « plans climats territoriaux », de la fermeture programmée du centre départemental de Météo-France à Auch.

6) Ma sixième proposition, pour la ruralité, est celle-ci : je demande un moratoire pour la fermeture des services publics dans le Gers, une augmentation des effectifs d’enseignants et d’aides à la vie scolaire dans nos établissements scolaires, un maintien des effectifs de police et de gendarmerie, et un maintien du centre départemental de Météo-France.

Avec la validation d’une nouvelle génération de PER, ces six propositions, si elles étaient acceptées, seraient de nature à rétablir la confiance entre le monde rural et l’Etat, et de ce fait, bénéficieraient au développement de notre Pays.

 
- Publié dans : ECONOMIE
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